jeudi 12 février 2015

Numance : Un symbole hier, le patrimoine aujourd'hui, un avenir incertain


Après les belles demeures, je vous propose de faire un petit tour dans l’Antiquité. Il faut croire que cette merveilleuse période doit me manquer puisque je ne l’étudie pas ce semestre. Les sites antiques ne manquent pas en Espagne, la mémoire de cette période est bien entretenue dans ma région de prédilection. Je suis très loin d’avoir tout visiter dans ce domaine et sûrement pas les plus beaux sites, mais côté musées j’ai fait quelques très belles découvertes. Commençons quand même cette série par un site archéologique, à une vingtaine de minutes de Soria, sur la commune de Garray (pour trouver sur le GPS mieux vaut le nom contemporain). Direction le site de Numance.



            Mettons les choses au clair tout de suite, j’ai été déçue par le site dont j’attendais beaucoup, peut être trop. On arrive par une petite route au parking du site. Numance voilà un nom qui résonne dans mes cours d’histoire pour le long siège qui y eut lieu. Mais attention, le site est occupé depuis la préhistoire, comme le révèlent les premières fouilles du XIXe siècle. La ville est conquise par les romains en 133 avant Jésus Christ, après quinze mois de siège. Les habitants auraient mis feu à la ville pour qu’elle ne tombe pas aux mains des romains, une couche de cendre découverte par Saavedra le démontrera. Une nouvelle ville fut probablement bâtie sous Auguste.
La mémoire de la ville fut perdue durant la période médiévale. Numance resta longtemps un mythe, la preuve en est que Cervantès fit du siège de la ville une pièce de théâtre, bien des années avant de rédiger Don Quichotte dans sa maison de Valladolid. Quoi de mieux en effet que des celtibères résistant à l’envahisseur romain ? Chacun s’appropria à sa façon l’épisode du siège de Numance. 
 Les premières traces d’un intérêt pour ce site, datent du XVIIIe siècle et commencent par un premier plan du site en 1788. En 1803 aurait eu lieu la première fouille officielle sur les lieux. Mais, comme c’est souvent le cas à l’époque, ce qui motive les chercheurs c’est la possible découverte d’inscriptions. Il faudra attendre une cinquantaine d’années pour voir des travaux archéologiques sérieux se mettre en place, sous la direction d’Eduardo Saavedra. C’est lui qui va vraiment tenter d’établir le lieu précis du fameux siège de Numance, événement rapporté par les auteurs classiques qu’il a lus. Les problèmes politiques empêchent les fouilles de continuer à partir de 1868. Ces recherches, qui permirent d’identifier clairement les lieux ne furent pas vaines, puisque, grâce à elles, la colline est classée en 1882, monument national.
Le début du siècle est marqué par l’apparition d’un monument sur le site, en août 1905, Alphonse XIII l’inaugure. Depuis plusieurs décennies on souhaite honorer les héros de Numance, c'est-à-dire les fameux celtibères qui ont résisté voilà deux millénaires.    
Ce n’est donc qu’en 1905 que l’histoire archéologique des lieux peut reprendre. C’est un archéologue allemand, Adolf Schulten, qui commence ses recherches et fouille le site plusieurs fois pendant neuf ans, jusqu’en 1914. Encore une fois, les événements politiques stoppent le travail des historiens de Numance. L’archéologue allemand publiera en 1945 un livre qui fera autorité sur l’histoire du site. En parallèle des recherches allemandes, les espagnols continuent à étudier le site. Malgré le départ de Schulten, qui reviendra, mais partira aussi s’intéresser à d’autres sites, on fait des découvertes. Des rues sont identifiées en 1920 par exemple. Mais ces travaux se terminent en 1923. Quelques études seront réalisées par la suite mais il faut attendre la fin des années 1960 pour que le site soit vraiment au cœur de nouvelles préoccupations. Notamment avec le travail sur le musée et l’organisation des collections.

Monument inauguré par Alphonse XIII

Aujourd’hui le site de Soria est perçu comme un véritable atout touristique. Des spectacles sont donnés, une projection de reconstitution virtuelle est proposée aux visiteurs au début de leurs visites. Pourtant aujourd’hui Numance voit une nouvelle menace s’approcher d’elle. En effet la zone occupée par la ville antique est relativement étendue, ce qui rentre en conflit avec l’extension de la ville moderne. En 2008 les journaux régionaux, mais aussi nationaux se font l’écho du danger qui guette le site archéologique. On parle d'étendre lotissements et polygones industriels, ce qui détruirait le paysage alentour. 12 000 signatures seront récoltées, pour tirer la sonnette d'alarme, qui, à défaut de pouvoir arrêter les projets en route, veulent éviter d'autres erreurs. En 2012 une dotation de 6000 euro est versée au site pour sa consolidation comme l'explique cet article. Certains luttent pour faire classer le site au patrimoine mondial de l'UNESCO, d'un autre côté tout est fait pour multiplier le nombre de visiteurs (pour plus de détails sur les chiffres voici de la lecture). Comme partout l'argent que coûte l’entretien du site reste un risque de conflit, actuellement c'est la municipalité de Garray qui assume celui-ci ainsi que les visites guidées.



            Peut être la météo, un temps très venteux, n’a pas joué en la faveur du site lors de ma visite, mais je m’y suis quand même un peu ennuyée. Je m’attendais vraiment à quelque chose de plus important. Sans rêver de voir un équivalent d’Herculanum, je m’imaginais des restes archéologiques plus parlants. A moins d’être passionné par l’histoire des peuples celtibères ou mordu d’archéologie, vous pouvez tout à fait passer votre chemin. Une visite qui est loin d’être essentielle donc, il y a tellement de jolies choses à voir à Soria que prendre la voiture pour se rendre là bas est loin d’être indispensable.
            Bon voyage dans la province de Soria


A consulter le site officiel très complet. A lire un article sur les fouilles de Saavedra. Enfin si vous souhaitez suivre la vie du site quelques pages facebook sont à votre disposition dont celle-ci. 




1 commentaire:

  1. Vraiment magnifique, c'est ce que je voulais faire quand j'étais plus jeune, partir à la découverte de ces bijoux encore sous terre.

    Très bel article

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